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14 décembre 2010 2 14 /12 /décembre /2010 15:14

 

 

Une bonne dizaine d'années après sa création en fanfare au milieu des déclarations enthousiastes et volontaristes des hommes politiques européens, les travers de la monnaie unique nous reviennent dans la figure avec une violence décuplée par la crise économique mondiale, elle-même résultat des comportements surréalistes des marchés et organismes financiers notamment américains.

De bons esprits avaient à l'époque attiré l'attention de l'opinion et des dirigeants politiques sur les risques de mettre en place de manière imposée et volontariste une monnaie unique devenant de facto le seul outil monétaire d'un ensemble de pays (la zone euro) au sein de la communauté Européenne et interdisant à ces mêmes pays toute manipulation ultérieure de cette monnaie sur laquelle ils n'avaient plus prise, gérée qu'elle était par la BCE organisme déclaré indépendant des Etats.

Dans l'enthousiasme européen collectif de la fin du XXème siècle, concrétisé lors du traité de Maastricht, tout le monde a semblé oublier les fondamentaux d'une monnaie.

Quels sont-ils ?

La première caractéristique d'une monnaie nationale est de représenter la santé économique du pays concerné. Si le pays est socialement stable avec de bonnes règles de gouvernance interne, une économie dynamique, un taux d'emploi convenable, des finances publiques maîtrisées et des déficits sous contrôle, la monnaie sera forte, respectée par les marchés et aura tendance à s'apprécier par comparaison à des monnaies plus faibles. Un beau cas d'école nous a été fourni en Europe par le deutschmark dans les dernières décennies du XXème siècle. A contrario un autre cas d'école nous a été fourni par le franc français qui navigua de dévaluations en dévaluations sous la IVème République pour aboutir à sa transformation en Nouveau franc ou Franc Pinay en 1960 (avec au passage une nouvelle dévaluation !). Il n'est d'ailleurs pas banal de rappeler les fortes réticences allemandes à l'abandon de sa super-monnaie. L'Allemagne finalement n'accepta que sous la contrainte d'un chantage sur sa réunification.

Appliquer ce fondamental à l'Euro revenait donc à considérer la nouvelle monnaie unique comme représentant la santé économique non pas d'un seul pays mais d'un ensemble disparate de pays aux politiques sociales, financières, économiques divergentes et aux niveaux de vie fort différents particulièrement pour les nouveaux pays entrants dans la zone Euro. Bref un respect même minimal de cohérence monétaire ne pouvait qu'imposer à tous les pays participants des contraintes d'autant plus fortes que leurs économies étaient fragiles, leurs déficits mal maîtrisés et leurs politiques laxistes.

Il y avait donc dès le départ violation d'un fondamental monétaire et cette violation de principe devait être compensée, autant se faire que peu, par des politiques volontaristes visant à donner de la cohérence au fonctionnement de la zone euro. On inventa donc des palliatifs (pacte de stabilité, projet de coordination renforcée, calendrier à long terme de réformes structurelles,...) bien vite malmenés par des Etats soucieux de leurs intérêts nationaux et de leur souveraineté et bientôt brisés par les réalités économiques.

A ce relatif échec s'ajoutèrent deux conduites de politiques qui devaient avec le temps s'avérer désastreuses.

La première fut la politique de la BCE d'un euro fort, prioritairement centrée sur la lutte contre l'inflation même au détriment de la croissance, ce qui ne fit que rendre plus difficiles voire insoutenables les conditions de concurrence commerciale avec les Etats-unis et la Chine qui utilisaient et utilisent toujours leur monnaie comme une arme commerciale. La conséquence fut une délocalisation importante des outils de production (600.000 emplois industriels perdus en 10 ans en France) accompagnée de taux élevés du chômage partout en Europe.

La seconde fut la possibilité pour les Etats de la zone euro d'emprunter en euro à des taux avantageux. Autant une politique de taux bas peut être une excellente chose pour des Etats raisonnables développant harmonieusement leurs infrastructures et leurs atouts économiques, autant elle peut devenir un piège mortel pour les Etats laxistes ne cherchant qu'à financer leurs déficits structurels au meilleur coût ou misant tout sur un secteur économique au risque de créer une bulle (cas de l'Espagne dans le secteur immobilier).

La crise financière de 2008 suivie d'une crise du secteur bancaire puis d'une crise économique générale a mis en évidence la fragilité de la zone euro et notamment de ses Etats les plus faibles qui sont aujourd'hui violemment attaqués par la spéculation mondiale (cette dernière ne pouvant les attaquer sur leurs monnaies nationales les attaque sur leurs taux de prêt qui ont tendance à s'envoler, faisant apparaître pour certains Etats fragilisés le spectre d'une cessation de paiement)

Une autre option avait été mise, à l'époque, en balance. il s'agissait d'une monnaie non plus unique mais commune aux pays participants qui auraient laissé aux Etats leur liberté monétaire tout en s'associant étroitement à un projet économique commun et offrant la possibilité de créer ce grand marché européen des capitaux dans une seule (commune) monnaie, qui devait être l'avantage décisif de la monnaie unique.

C'était le choix de nombreux économistes...mais ce ne fut pas celui des dirigeants politiques de l'époque, plus attachés aux rêves chimériques qu'aux réalités économiques. Les turbulences actuelles permettent d'apprécier leurs erreurs d'appréciation !

Est-il aujourd'hui trop tard pour revenir à une conception plus saine de la monnaie européenne ou est-ce toujours une question interdite ?



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