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7 juillet 2007 6 07 /07 /juillet /2007 12:06

 

De tous temps, un peuple se prétendant élu, a su, malgré sa faiblesse numérique et un environnement la plupart du temps hostile, générer des personnalités remarquables par leurs contributions aux arts, aux sciences ou aux affaires . On peut sans conteste dire que le docteur ZAMENHOFF, un juif d'origine polonaise, a aussi marqué son siècle, pour le meilleur, en nous faisant le sublime cadeau d'une LANGUE UNIVERSELLE, l'ESPERANTO, construite avec une lumineuse et rigoureuse simplicité et prenant appui sur les langues-mères européennes. Certains esprits critiques en ont déduit que cette langue soit-disant universelle ne pouvait adresser que les populations occidentales (globalement les "blancs" par opposition aux "noirs" ou aux "jaunes") à l'exclusion des autres et que c'était encore un coup de l'impérialisme occidental triomphant ! A noter que ceux-là sont les mêmes qui acceptent, de nos jours, la domination sans partage de l'anglo-américain dans le business, les arts, le cinéma, les moeurs, etc... !!! Comprenne qui pourra ! Le contre-argument que l'on peut opposer à cette théorie réductrice est que les langues russe, arabe, française, anglaise ou chinoise ont su (souvent bien sûr par la contrainte) se répandre chez des peuples qui avaient leurs propres idiomes et qu'aujourd'hui même l'anglo-américain est enseigné et parlé dans tous les pays du monde !

Mais laissons-là de telles arguties et revenons-en à notre bon docteur.

En cette fin de 19ème siècle, dans une ville polonaise secouée par les violences raciales, un jeune médecin juif désespère de voir s'affronter et parfois se massacrer des gens qui se réclament d'ethnies différentes, juive, polonaise, russe ou allemande et qui, bien entendu, ne peuvent se comprendre et a fortiori s'estimer puisque, parlant des langues différentes, ils ne se comprennent pas . Il a alors l'intuition juste que la barrière linguistique est l'obstacle fondamental à l'entente et à la bonne intelligence entre les peuples. Il décide donc de consacrer sa vie et toute son énergie à concevoir, développer puis diffuser une langue d'usage universel qui devra, pour réussir, être d'apprentissage facile et rapide et que pourront s'approprier avec aisance tous les gens de bonne volonté afin d'abattre enfin l'obstacle linguistique à la communication humaine (qui remonte à Babel selon la légende judéo-chrétienne). En 1905, se tiendra à Boulogne-sur-mer, le premier congrès espérantiste mondial qui réunira quelques centaines de personnes. Le mouvement était lancé. Il ne s'arrêtera plus. L'ESPERANTO possède aujourd'hui des millions de locuteurs de par le monde. Les activités culturelles, les réunions, congrés régionaux et mondiaux se multiplient, les journaux, revues, publications, de même que les activités sur le web se répandent. De nombreux pays (Chine, Brésil, Japon...) sont moteurs dans son développement. C'est la seule réussite mondiale d'une langue CONSTRUITE, malgré de nombreux autres essais au cours de l'Histoire, par sa pérennité (plus d'un siècle) et la progression continue de son audience internationale.

Homme cultivé et linguiste distingué, le jeune docteur maîtrise le latin, le grec, l'hébreu mais aussi les langues nationales qui co-existent dans son environnement de vie, à savoir le polonais, l'allemand, le lituanien et le russe. Il est donc très bien placé pour mesurer les efforts nécessaires à l'acquisition d'une nouvelle langue. Pour que son projet réussisse, il lui faut éliminer tout ce qui rebute le débutant dans une nouvelle langue, lui imposant des efforts de mémorisation trop importants, à savoir les complexités lexicale et grammaticale, les irrégularités, les incohérences ainsi que les évolutions et déformations liées à l'usage. La base de son travail sera d'établir une grammaire simple, stricte et logique associée à une base lexicale réduite mais dotée d'outils de développement à la fois puissants et invariables.

Examinons rapidement les principaux piliers de l'ESPERANTO :

L'alphabet d'abord. Il comporte 28 lettres (26 en français) dont 22 issues de l'alphabet latin plus 6 lettres accentuées (que l'on représente, hors Unicode, par un petit "x" associé à la lettre de base). Pourquoi ces accents ? Parce que certaines lettres ont des prononciations différentes dans les langues européennes (exemple : le "g" qui est dur en allemand,  doux en français, prononcé "dj" en anglais) et qu'il est essentiel d'avoir une phonétique commune pour échanger et se comprendre.

La prononciation, calvaire des anglicisants, est d'une simplicité totale : Chaque lettre se prononce avec une phonétique unique et invariable. Impossible de se tromper ou d'hésiter ! En prime, l'accentuation est également unique : sur l'avant-dernière syllabe, systématiquement. Exemple : ami-a-ble (aimablement, de manière aimable. Prononcer "é" pour le "e"). L'heureuse conséquence en est une phonétique familière pour le locuteur européen mais aussi facilement accessible à tout locuteur des 5 continents. C'est ainsi que l'on comprendra immédiatement un locuteur chinois, italien, américain, japonais ou indien et bien sûr européen même s'il conserve quelques intonations de sa langue nationale. Essayez donc la même chose avec l'anglo-américain !!

La grammaire. Ceux qui ont "potassé" ou qui "potassent" encore les livres et bouquins de grammaire des langues nationales en en maudissant les pièges et les complications sans fin, ne vont pas en croire leurs yeux !! La grammaire de l'ESPERANTO est constituée en tout et pour tout d'une bonne dizaine de règles toute simples qui s'appliquent sans exception (on croît rêver !). Il serait un peu long de les énumérer toutes dans cet article mais voyons-en quelques unes : Les substantifs se terminent en -o, les adjectifs en -a, les adverbes en -e. Appliquées à une même racine de mot, ces règles vont donner : bovo (boeuf) - bova (bovin) - bove (de manière bovine). Au pluriel, on ajoutera un "j" à la dernière lettre et pour le complément d'objet direct on ajoutera un "n". Quant aux verbes, c'est aussi simple : l'infinitif se termine en -i, le temps présent en -as, le temps passé en -is, le futur en -os, le conditionnel en -us et l'impératif en -u. Et tout cela, bien sûr, sans exception aucune.

Le vocabulaire. C'est le gros morceau dans la maîtrise d'une langue. Sans une base minimale acquise, impossible de s'exprimer et de comprendre ce que l'on entend (et quand, en plus, l'accent, l'intonation, le rythme, bref la phonétique s'en mêle ...!). La grande idée de Zamenhoff aura été de choisir, autant se faire que peut, des racines communes (très souvent dérivées du latin) aux différentes langues européennes puis de faire des choix arbitraires en faveur de l'une ou l'autre de ces langues en cas d'absence d'une telle racine. La base lexicale est donc constituée majoritairement de racines latines et minoritairement de racines anglo-saxonnes et slaves. C'est ainsi que le locuteur européen reconnaîtra phonétiquement un grand nombre de racines de mots, ce qui s'avérera un avantage important dans l'appropriation de l'ESPERANTO. Mais le trait de génie n'est pas dans cette tentative, somme toute logique, de synthèse des langues européennes. Il est dans la construction du vocabulaire à partir de ces racines. Un système régulier et extrêmement productif associe un nombre important d'affixes (10 préfixes et 32 suffixes) de sens invariable aux racines évoquées ci-dessus. Le vocabulaire de base nécessaire à l'échange et à la compréhension s'en trouve drastiquement réduit. On estime d'un facteur 10 la réduction lexicale par rapport à une langue nationale. Dix fois moins de vocabulaire à assimiler. Belle performance ! 

Deux exemples pour illustrer ce système et montrer sa puissance productive : Une racine au sens évident : parol- va donner : paroli (parler) - parolo (parole) - parola (oral) - parole (oralement) - parolado (discours) - parolisto (porte-parole) - parolulo (parleur, phraseur, celui qui parle) - parolema (bavard, qui aime parler) - parolanto (parleur, orateur en cours)- parolonto (celui qui va parler) - parolinto (celui qui a parlé) mais aussi : alparoli (s'adresser à quelqu'un) - elparoli (exprimer, émettre des mots) - priparoli (discuter) - priparolo (discussion) - etc...On peut aussi appliquer le même système à une simple préposition. exemple : per (au moyen de) va donner : pera (intermédiaire) - senpera (direct, immédiat) - pere (de manière indirecte) - senpere (de manière directe) - perado (truchement, entremise) - peri (s'entremettre, procurer) - perilo (moyen, ressource) - perulo ou peranto (médiateur, négociateur) - etc...A titre de curiosté, comptez le nombre de mots différents utilisés en français pour exprimer les mêmes dérivés de ces deux racines !

L'évolution de la langue. Même avec des règles simples et strictes excluant toute particularité ou exception, une langue n'est jamais à l'abri d'évolution d'usage voire de déviances (simplifications excessives, abandon de règles, etc...) dès quelle est pratiquée par de nombreuses populations ayant des cultures différentes. L'ESPERANTO n'échappe pas à cette règle. Très tôt, des organismes internationaux ont veillé à ce phénomène et validé les évolutions considérées comme acceptables ou justifiées. Relativement peu nombreuses, les évolutions concernent notamment la sémantique de certaines racines (évolution du sens au cours du temps), l'apparition de nouvelles racines (pour suivre l'évolution des sciences et des techniques) et la disparition de quelques autres, une fréquence plus élevée de l'emploi de la forme adverbiale (final en -e) et une généralisation de la mise à la forme verbale de toute racine. Rien à voir avec les évolutions sémantiques et structurelles de l'anglo-américain sans aucun contrôle international !

Ue telle langue construite a également la capacité de s'adapter aux languages spécialisés qu'ils soient juridique, économique, commercial, scientifique, littéraire ou poêtique. A preuve les bibliothèques de livres et de documents existant aujourd'hui dans ces différentes disciplines. Elle pourrait constituer la langue-pivot idéale pour la commuauté européenne, sa trentaine de langues nationales (en attendant mieux !) et ses coûts exorbitants de translation et de traduction simultanée.

Ne manque qu'une chose : la volonté politique ! Quel dirigeant osera affronter le monstre économico-linguistique anglo-américain ? Cela viendra-t-il d'un pays émergent (pourquoi pas les chinois !) ou d'un groupe de pays lassé de l'écrasante tutelle culturelle américaine ?

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