L'extreme fin du XXème siècle a vu éclore un nouveau concept, très prisé de la France des affaires qui ne déroge pas au penchant bien français pour "l'intellectualisation" de tout ce qui a l'air nouveau ! Son nom un peu mysterieux, l'Intelligence Economique, ne peut qu'interpeller l'imagination de tout un chacun. Celui qui aura lu trop de livres d'espionnage imaginera des ex-espions au chomage, nostalgiques de la guerre froide, se recyclant dans le "renseignement" économique et allant extirper, tels des ombres maléfiques, les secrets (souvent bien mal gardés) des sociétés innovantes pour les revendre aux sociétés concurrentes ou au plus offrant. Un autre moins romantique verra dans l'éclosion de ce concept les conséquences de la diffusion mondiale de l'information sous toutes ses formes et de la quasi-impossibilité d'en assurer le controle.
Le propos n'est pas de nier l'existence de l'espionnage économique, invention non récente mais qui n'a pu que s'amplifier d'une manière sans doute considérable par le moyen des nouvelles technologies de diffusion et de traitement de l'information. Des affaires importantes dans ce domaine défraient régulièrement la chronique et sont là pour en confirmer la réalité. L'Intelligence Economique dont nous traitons ici ne recouvre, de manière très stricte, que la collecte, l'analyse et l'exploitation d'informations relatives à un domaine déterminé en vue d'une plus grande efficacité économique. Elle se distingue donc très clairement de deux autres activités : la Sureté (qui concerne la protection du secret et le contre-espionnage) et l'Investigation (qui concerne les enquetes judiciaires, administratives, légales ou illégales et l'espionnage). La récente Académie de l'Intelligence Economique propose la définition suivante : " l'intelligence économique recouvre les actions pratiques, les procédures et les moyens permettant, d'une part, de comprendre , grace à la maitrise de l'information, l'environnement économique de l'Entreprise, et d'autre part, d'agir ou de réagir, si possible par anticipation"
On utilisait auparavant un terme - La Veille Economique - qui recouvrait de nombreux aspects du nouveau concept et qui n'est heureusement pas tombé en désuétude. En effet, pour un entrepreneur lucide et organisé (2 qualités majeures dans ce métier sous réserve de réveils douloureux !), veiller à ce qui se passe autour de soi à tous points de vue (technologie, commerce, juridiction, droit des affaires et du travail, concurrence locale et étrangère, évolutions des besoins, etc...) relève du bon sens et de l'organisation. Une fois cela dit, restent à mettre en place les bons procédés, choisir les bons outils ...et n'y pas consacrer trop de ressources surtout si on est une PME ! C'est sans doute au niveau de la modernité des outils proposés que les acteurs de l'IE vont faire oeuvre d'innovation.
Quatre concepts sont regroupés sous cette appellation : L'IE proprement dite (son évolution et enrichissement), le KM (Knowledge Management ou Gestion de la Connaissance), la Veille et le Lobbying.
La méthodologie générale se décompose en 3 phases principales qui sont : la Collecte, l'Analyse et le Traitement, la Diffusion auxquelles vont s'associer des outils de recherche/analyse de données, de protection, d'évaluation et benchmarking.
Les outils disponibles sur le marché sont de 6 types qui ne seront pas détaillés ci-joint mais qui peuvent etre consultés sur le site www.veille.com : Les Portails sur moteurs et réfèrencement, les Moteurs généralistes et spécialisés, les metaMoteurs (Ariane6, Kartoo, Ixquick...), les Agents de recherche (Kalimage, AgentLand, BullEye...), les Agents de veille ( Wysigot, Agentia, MyUpdate...) et enfin les Solutions Serveurs (ApertoLibro, WatchEdition, LexiQuest....)
Afin de préciser un peu les choses, examinons les caractéristiques de l'outil de veille Cybion Eye (développé avec le soutien du MINEFI) : Cet outil assure l'exécution des 3 phases de la méthodologie générale décrite plus haut avec pour objectif l'automatisation intelligente (économie de moyens et efficacité) de ces phases. Pour la 1ère phase de collecte/identification des sources, il ne va pas retenir les outils du marché (Crawlers et metaMoteurs) jugés insatisfaisants mais gérer un système d'apprentissage afin d'aboutir à une collecte à la fois plus rapide, plus fréquente et plus exhaustive. Il va donc sélectionner et filtrer les articles adéquats et constituer une base de données structurée et référencée qui sera exploitée dans la suite du processus, lui-meme régi par un ensemble de règles (sources, fréquence de collecte, critères de sélection, profils utilisateurs, etc ...) sous le controle d'un administrateur. Il s'agit, à l'évidence, d'un outil vivant dont la mise à jour et l'entretien sont essentiels pour la qualité du résultat.
Querls acteurs rencontre-t-on sur ce marché ? Pour la clarté des choses on va les répartir en 4 catégories : Les Cabinets spécialisés (une cinquantaine répertoriés en France), Les Courtiers en information, les Editeurs (une quarantaine) et enfin une pléiade d'Associations (64 référencés à ce jour) et d'Organismes divers et variés parmi lesquels le Gouvernement français tout d'abord qui a lancé dès 2003 une véritable politique publique de l'IE mais aussi l'ANVAR, le MEDEF, le CFCE , le CEPIT et de nombreuses Chambres de Commerce (CCIP et des Chambres Régionales) sans oublier les Universités et Grandes Ecoles qui proposent des mastères (EISTI, ESIEE par exemple)
L'information sur le sujet est, quant à elle, assurée par des réseaux, des blogs (ex : le Blog de l'IE sur le site des Echos), des annuaires, des cercles, des livres (voir la Documentation Française à titre d'exemple) et autres publications.
Cette nouvelle activité a engendré une dizaine de nouveaux métiers répertoriés par l'Académie de l'IE (déjà citée plus haut) : formateur, veilleur, analyste, auditeur, consultant, éditeur de logiciels, directeur ou responsable, délégué général et enfin lobbyiste.
L'activité relative à l'IE est promise à un bel avenir dans le sillon de la nouvelle Economie immatérielle (ou de la connaissance ou des services selon le terme que l'on préférera).