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30 novembre 2008 7 30 /11 /novembre /2008 13:57



S'intéresser à la relation entre l'économie et l'homme, cela revient à examiner le comportement humain au travers du prisme économique, à observer l'Homo economicus* (désignation générique commode et répondant bien à notre besoin rationnel de simplification) successeur des Homo Erectus, Sapiens, Romanus, Gallicus voire Sovieticus,...dans ses relations pratiques avec les choses matérielles, en faisant abstraction de ses besoins, de ses élans vers la spiritualité et les valeurs non marchandes.

De tous temps il y a naturellement eu une part "d'economicus" dans l'homme.

Il lui a, en effet, toujours fallu créer un embryon de système économique aussi succinct fut-il afin de pourvoir à ses besoins et veiller à sa pérennité (se nourrir, se vêtir, se protéger des menaces extérieures, survivre aux catastrophes climatiques, fabriquer des outils, échanger avec d'autres groupes humains, organiser la vie et la protection du cercle rapproché) .

Ce besoin d'organisation alla s'élargissant avec le temps et l'apparition de groupes humains plus larges, plus complexes, plus diversifiés. Le passage de la migration suivant celle des animaux-gibiers à la sédentarisation avec l'invention de l'agriculture va entraîner le premier changement fondamental dans le comportement humain. Avec les premiers villages puis les premières villes sont apparues les premières civilisations, les premières organisations sociétales avec distribution des rôles, répartition des tâches et donc spécialisation des activités.

Qu'en est-il de l'Homo economicus* d'aujourd'hui ?

A-t-il évolué au sortir de ce vingtième siècle plus fou que les autres et au départ tonitruant du 21ème qui n'aura pas attendu 10 ans pour nous infliger une énorme crise financière d'abord et économique ensuite ?

 Le nouvel Homo diffère-t-il sensiblement de celui des trois siècles précédents qui ont vu éclore puis se développer le Capitalisme en tant que superstructure du système d'Economie de marché (système à peu près répandu partout de par le monde depuis le fond des âges) ?

 

S'il est une différence indéniable et essentielle entre l'Homo économicus moderne et celui d'il y a - disons - 3 siècles, elle tient dans la démocratisation du savoir et le droit de chaque individu à exercer son libre-arbitre et son esprit d'entreprise.

Il y a 3 siècles, en effet, et pour ne parler que des pays européens, le régime de la Royauté absolue (à l'exception notable de l'Angleterre, ce qui ne sera pas sans incidence sur le développement du capitalisme dans ce pays) est la règle. La naissance primait tout. Etre bien né vous ouvrait toutes les portes et d'abord celle du savoir dispensé par de précepteurs privés attachés aux familles. Etre fils de paysan (environ 90% de la population) vous les fermait toutes en vous attachant à la terre natale dont on ne s'échappait que par l'aventure (les colonies, l'armée, la truanderie,...) ou par un destin exceptionnel. Pour ajouter au tableau, l'Eglise dominait les consciences, imposant aux individus et particulièrement aux masses rurales ignorantes ce qui est plaisant ou déplaisant à Dieu, à travers des dogmes et des règles de conduite qu'il était alors fort déconseillé de contester ouvertement !

Rien d'étonnant donc que jusqu'à la fin du 18ème siècle voire du 19ème  les oeuvres d'esprit comme les activités de commerce et d'argent aient été l'apanage de la "bonne société" (environ 10% de la population en comptant très large !). Il faudra l'influence des "Lumières" du 17ème siècle et, au 18ème, la montée en puissance de la bourgeoisie d'affaires au dépens d'une noblesse oisive et méprisant le négoce, pour faire basculer l'ancien régime dans la trappe de l'histoire et abolir enfin ce droit de naissance par la Déclaration Universelle des droits de l'homme et du citoyen.

A l'inverse, les temps modernes et particulièrement depuis la moitié du 20ème siècle ont vu émerger dans tous les pays développés, une classe moyenne importante, éduquée, souvent entreprenante, exprimant ses qualités dans tous les domaines et profitant du fameux ascenseur social que lui procuraient les études et l'acquisition des savoirs. On voyait alors des fils d'ouvriers ou d'instituteurs atteindre le sommet de l'Etat et des affaires ou briller dans les sciences ou les arts. En même temps le mode rural se vidait pour ne plus représenter à l'époque actuelle que quelques maigres % d'une population majoritairement urbanisée.

On peut donc affirmer, sans grand risque de se tromper, que l'Homo economicus contemporain, statistiquement mieux éduqué, libéré en grande partie de l'asservissement rituel religieux, formé à la réflexion critique et à toutes sortes de techniques, est beaucoup mieux armé que ses prédécesseurs pour appréhender le savoir économique (et donc, pensera-t-on, gérer à meilleur escient sa propre action d'agent économique).....mais ce savoir,  le maîtrise-t-il mieux pour autant ?

En même temps que le capitalisme, dès le 19ème siècle, recouvrait tous les secteurs de l'économie de marché, la formidable (par ses effets) nuisance idéologique marxiste basée sur une fausse théorie économique mais comme attisée et justifiée par la brutalité des excès mêmes du capitalisme s'emparait de beaucoup d'esprits plus sensibles aux idées de justice et d'égalité qu'à la performance économique. Le résultat de cette idéologie économique fut la domination au moyen de la terreur d'Etat d'une grande partie de l'Europe puis d'une partie de l'Asie pendant le plus clair du 20ème siècle avant que son inévitable débâcle économique (sauf en Chine où la nomenklatura inventa un curieux "capitalisme socialiste d'état" aux résultats économiques impressionnants) ne redonne ses droits à l'économie de marché.

Mais comme si les leçons de l'Histoire ne servaient à rien, cet esprit marxisant, ennemi de la libre entreprise et de l'initiative individuelle, est loin d'avoir disparu. Il a toujours sa place dans les congrès socialistes comme dans l'enseignement et les milieux universitaires et son influence dans l'opinion publique reste grande. Le capitalisme y est toujours déguisé en diable malfaisant, près à tout pour amasser des fortunes, exploiter le bon peuple et le jeter dans la misère ! Un parti "anti-capitaliste" (qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire aujourd'hui ? Veut-on exclure le capital de l'échange marchand ? mais alors d'où viendra l'investissement nécessaire à l'acte productif ? Veut-on seulement combattre les injustices qu'il génère ? Mystère bien caché derrière le déluge de mots et d'anathèmes démagogiques ...!!) vient même de se créer à l'extrême-gauche française et les bienfaits de l'économie de marché ne sont reconnus qu'à mots couverts par des dirigeants socialistes plus à l'aise avec les termes de régulation, réglementation, étatisation, secteur public, pouvoir public...le plus grand péril semblant être à leurs yeux l'enrichissement de l'entrepreneur sur le dos de ses employés et de ses clients, qu'il faut empêcher de délocaliser ou de fuir, mauvaise fortune faite, vers de cieux ensoleillés !

Le système capitaliste dans sa version la plus contemporaine avec les soubresauts et les déséquilibres de la mondialisation, l'apparition récente (20 ans tout au plus) d'une industrie financière aux fols excès, contournant les contrôles et  transformant les bourses en casinos avant de générer débâcle et chaos dans le système bancaire international, est aujourd'hui tellement discrédité dans l'opinion que, par un retour naturel de balancier, l'interventionnisme et le dirigisme d'Etat retrouvent de bien dangereuses vertus que l'on croyait sinon oubliées du moins mise pour longtemps sous le boisseau.

L'Homo economicus moderne ainsi englué dans une dialectique opposant Etat et individu, dirigisme et liberté ou initiative et protection semble donc aujourd'hui fort éloigné d'un consensus général sur lequel se construiraient  les règles d'une économie sociale et mondiale de marché remettant l'homme et non l'argent  au centre d'un projet commun et jugulant les méfaits potentiels de l'omnipotent capitalisme sans en briser les élans. Les progrès en connaissance et savoir semblent bien avoir été contrebalancés par la complexification d'un phénomène économique embrassant de nos jours le monde entier.

 

Comparé à son prédécesseur pré-moderne, on donnera donc à l'Homo economicus contemporain l'avantage d'un savoir plus important et plus diffusé, d'un libre-arbitre bien mieux respecté et exercé, d'un droit à l'initiative personnelle reconnu et même (parfois) encouragé.

Voilà qui est fort bien ...même si cet avantage amène notre brave Homo economicus au troublant et piteux constat de son impossibilité à déchiffrer un système économique devenu à la fois planétaire et formidablement complexe !

   

 

Le lecteur tirera de ces quelques réflexions les conclusions qui lui sembleront pertinentes.


* On tentera de définir L'homo economicus comme une sorte d'individu virtuel dont on ne prendrait en compte que la dimension économique sans toutefois faire abstraction de ses caractéristiques psychologiques qui peuvent commander ses actions et réactions devant le fait économique (avéré ou imaginé).

Son libre-arbitre - forcèment influencé et encadré par le conditionnement sociétal ambiant - pousse naturellement l'homme à la satisfaction de ses besoins d'abord vitaux puis plus élaborés (estime de soi, reconnaissance par les autres, intérêt, confort, sécurité, ambition, pouvoir, richesse, égalité, justice, créativité,...).

C'est donc l'ensemble de ses comportements économiques (rationnels ou irrationnels) découlant de son éducation et de sa position sociétale qui va caractériser notre virtuel "homo economicus".

 



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